Au Québec comme partout ailleurs dans le monde, la pandémie de COVID-19 provoque un état d’urgence sans précédent.

Nous observons fort heureusement une multiplication des gestes de solidarité, d’entraide ou de générosité représentant une réponse collective à la hauteur des défis posés par l’apparition de ce virus.

Une kyrielle d’activités-bénéfice prévues ce printemps ont été reportées au plus tôt à l’automne 2020 sous toutes réserves. Certaines plus en 2021 parce que l’an prochain, c’est comme demain. Sans compter les autres qui ne reviendront probablement jamais… Pour bon nombre d’organismes communautaires, la générosité ne peut pas être reportée à plus tard. Si les mesures de distanciation physique aident à sauver des vies, il n’y a pas de distanciation pour nos organismes.  On compte environ 8 000 organismes communautaires au Québec. Près de la moitié d’entre eux appartiennent au mouvement d’action communautaire autonome.

La fermeture temporaire d’organismes communautaires qui offrent entre autres des services de première ligne aux personnes les plus vulnérables dans nos communautés est extrêmement préoccupante. En raison d’un manque évident de ressources financières et humaines, les organismes font face à une crise inédite. Même si nous devons néanmoins saluer de belles initiatives spontanées comme par exemple celles de Centraide et de la Fondation Québec Philanthrope avec l’annonce de la mise sur pied de fonds d’urgence, nous devrons faire plus.

  • Écouter son GPS

La crise humaine supplante la crise sanitaire malgré le programme Soutien à l’Action bénévole lancé par le gouvernement du Québec avec une enveloppe de 20,4 M$ répartie entre les 125 députés. Faire sa part en tenant compte d’une « appréciation subjective » se veut un pas dans la bonne direction. Mais à la croisée des chemins, beaucoup d’organismes communautaires se demandent en ce moment s’ils doivent tourner à droite ou à gauche. Ou encore pire soit faire demi-tour sans prendre le temps d’écouter leur GPS. G pour Générosité anticipée. P pour Proactivité immédiate. S pour Sagesse éprouvée.

Le soutien financier du gouvernement fédéral au réseau d’organismes communautaires touché par le coronavirus a aussi été reconnu comme un élément important. Bon nombre d’organismes n’a pas facilement accès aux prêts ou aux capitaux. Chaque jour compte et les délais sont cruciaux.

En cette sixième semaine depuis le fameux « Vendredi 13 », nous constatons que les conséquences sont décuplées. Nous assistons à une diminution des services alors que les besoins augmentent, que de plus en plus de gens ont faim, sont isolés ou en détresse.

 

Le rôle des banques alimentaires, des organismes qui offrent du dépannage alimentaire et de tous les organismes qui ciblent l’intervention psychosociale est essentiel pour aider les membres dans les communautés à conserver leur santé physique et mentale.

Nous ne pouvons pas laisser les personnes en situation de pauvreté le ventre vide, les personnes aux prises avec des problématiques de santé mentale sans aide et les personnes isolées sans information, sans soutien. Panser les « blessures » et… penser à « l’après-crise ».

La pandémie confirme que nous nous retrouvons maintenant dans une situation de réel isolement social. Il faut la surmonter en recréant des liens sociaux de quelque manière que ce soit, quel que soit le type d’aide que l’on puisse apporter aux personnes dans le besoin.

  • Le rôle important des bénévoles et…

Chaque geste compte. Chaque don fait une différence. Chaque bénévole est le bienvenu, plus que jamais en cette Semaine nationale des bénévoles ! Souvent âgés de plus de 70 ans et actuellement confinés à la maison, ces personnes jouent un rôle essentiel au sein des organismes communautaires. Ils aident les familles qui peinent à se nourrir, les travailleurs qui ont perdu leur emploi, les aînés isolés, les personnes qui ont des problématiques de santé mentale, les femmes qui vivent de la violence conjugale. Le contexte actuel accentue la valeur de leur engagement. Ils arrivent avec leur couleur distincte pour peindre cet arc-en-ciel, porteur d’espoir pour des milliers de personnes. Ce n’est pas rien.

Le ruban coloré et son mot clé « CaVaBienAller » n’ont d’égal que la résilience en sachant très bien que l’argent ne pourra pas sauver la planète et que la philanthropie devra s’adapter. Ça devrait bien aller si nous répondons « présents ». Parce que les besoins criants d’aide aux gens vulnérables et isolés n’ont pas disparu depuis que le Québec est en mode « pause ». Nous devons actionner le bouton « Joue » car sont apparus hélas de nouveaux besoins. Dans plusieurs organismes, les demandes ont doublé, parfois même triplé.

Le renouvellement-rajeunissement de la banque de bénévoles sera d’actualité à moyen et long terme. Les moins de 60 ans seront courtisés lorsque le paysage adoptera des couleurs estivales, sinon plus automnales. D’ici les prochains mois, les travailleurs mis à pied peuvent peut-être trouver un sens à ce « Du jamais vu » pour lancer haut et fort avec une modestie mesurée « As-tu vu comme cela fait du bien ».

Nous devons cocréer ce « nouveau monde » par la mise en place de mesures inspirantes pour rejoindre les personnes isolées, dont les sans-abris, non admissibles aux mesures de sécurité sociale annoncées jusqu’à ce jour.

  • Jumelage incontournable

Les « Nostradamus philanthropiques » souffleront peut-être bientôt l’idée de jumelage ou de cohabitation chez de nombreux organismes communautaires dont la survie favorisera l’avènement de programmes novateurs, le sociofinancement et l’animation de plateformes virtuelles. La cogitation doit commencer pour esquisser des pistes. Rêver de mesures « au conditionnel » fera la Une.

Nous sommes tous concernés en ce moment, mais nous ne le sommes pas de la même façon. L’écosystème philanthropique est interpellé plus que jamais. Comme le « retour à la normale » ne sera pas au rendez-vous, la survie de nombreux organismes communautaires en dépend. À ne pas en douter, elle repose sur une capacité d’adaptation et d’ingéniosité. Cette résilience imposée se traduira par une refonte de nos organisations et leur pérennité.  

Un jour à la fois sans perdre la foi.

 

Jocelyn Thémens, consultant chez BNP Performance philanthropique